[Chronique] JP Manova - 19h07 (2015)

JP... il est 19 heures... 19 heures 07, prévient une voix suave sur une intro ferroviaire. Un titre horaire pour dire que JP Manova a lui-même choisi l'heure pour sortir son premier album.

Producteur, compositeur, ingé son ou mixeur, JP Manova aka Djeep traîne dans les coulisses du rap français depuis longtemps. Un cursus fleuri d’apparitions furtives (Rocé), de featuring remarqués (Flynt, Deen Burbigo) et d'amitiés fidèles (MC Solaar à qui il fait un clin d'œil en échantillonnant la Concubine de l'hémoglobine sur Longueur d'onde).


Patient, JP Manova a préféré rester "un travailleur qui fait du rap". Sans se soucier des modes, des uns ou des autres.



Alors que certains font de la gonflette à l'auto-tune, JP opte pour un certain classicisme dans les prods. Un beat franc, quelques samples, des cuivres et un zeste de G-funk servent parfaitement le propos de JP Manova qui pose à l'aise son flow chanté rappé. Des instrumentales souvent groovy, parfois bossa avec un bout du Berimbau d'Astrud Gilberto sur Capoeira Verbale. D'autres qui avancent toute basse dehors, comme Pas d'bol ou Longueur d'onde (avec un sample de Pusha T).

Dans le clip façon photobomb de Is Everything right l'ancien égratigne le vernis de la capitale du luxe : "Si tu vois le 'sin-cou' à Jay Z ou Lady Gaga, lui prends pas la tête avec nos malaises et nos tracas". Il dresse un portrait du vieux Paname dans Skinhead aux cheveux longs et de ses nouveaux fachos, "polluant les rues comme une irruption d'herpès, un pâle résidu de l'occupation S.S."



Capillarité (encore), quand La Barbe de Morgan Freeman vient chatouiller les tympans - "Si j'étais né en 17, j'aurais fait du jazz, avec des solos de sax qui déglinguent les cages." Puis, Tout les 25 ans, évoque les bégaiements artistiques - "Les vieux rebelles se décalent dans l'fond, les jeunes rebelles rechantent la chanson."

A noter, un titre sur Thomas Sankara dont JP Manova sample le discours : Pas "du genre de ces p'tits chefs pleins d'apparats (...) Un soldat du Burkina : Sankara." L’album se termine sur un piano mélancolique qui explose finalement en drum’n’bass et une question : "À quel point penses-tu être libre ? M'a dit ce clochard semblant perdre l'équilibre." 

Le tout respire le sens et le bon, comme un vieux briscard taiseux qui vise au poil en quelques mots dès qu'il l'ouvre - 11 tracks seulement en 34 minutes. Qu'attendre de plus d'un album qui commence sur un duo en spirale avec Rocé, une autre tête pensante du hip hop français.

@choapuech

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